-
Communauté des Capucins d'Enghien, 1909
-
Eusèbe d'Enghien - Joseph Dodelet
-
Désiré d'Enghien - Joseph-Nicolas Dubois
Les Capucins natifs d' Enghien depuis 1850
Jean-Pierre Tytgat
ANNALES DU CERCLE ARCHEOLOGIQUE D'ENGHIEN, T. XXXII, 1998, pp. 259-288.
Cet article fait suite à l'article précédent: J-P.TYTGAT, Les Capucins ont quitté Enghien, dans A.C.A.E., t. XXI, 1997, pp. 217-240. HILDEBRAND, De kapucijnen in de Nederlanden en het prinsbisdom Luik, IVème partie. De Waalse religieuzen, Anvers, 1948, VIIème partie, De Vlaamse religieuzen, Anvers, 1952, et Xème partie, Einde en nieuw begin, Anvers 1955. Le jour de sa vêture le novice-Capucin recevait un nom, mentionné dans le Martyrologium Romano-Seraphicum, suivi du lieu de sa naissance. Pour l'expliquer avec un exemple: Leo Roeykens entra chez les Capucins le 15 septembre 1930. Il recevait le nom d'Auguste et parce qu'il était né à Tervuren, son nom de religion était Auguste de Tervuren. Toutes les données biographiques sont extraites des Acta provincialia, des Acta conventualia et Personalia, qui se trouvent aux archives des Capucins (en abrégé ACB), Ossenmarkt 14, 2000 Antwerpen. Presqu'aucune référence n'est ici citée; en effet, il est facile de retrouver toutes les données au dossier personnel de chaque religieux (ACB. section VI). ACB. VI. 617. Le vicaire aide le gardien dans l'administration de la communauté et le remplace en son absence. Michel Breda de Hellebecq (1835-1909) était Père gardien du couvent de Bruxelles pendant l'épidémie de choléra. J.-P. TYTGAT, Kapucijnen en cholera te Brussel in 1866, dans Vox Minorum, 49, 1996, pp. 213-216. ACB. VI. 408. Archives d'Arenberg Enghien, Enghien après 1800, Dossier Orphelinat, 2019. Loiseaux, Jean-Joseph, né à Mons le 5 août 1815; licencié en droit canon (1843); professeur de droit canon au grand séminaire de Toumai de 1847 à 1854; curé d'Ellignies-Sainte-Anne de 1854 à 1865; chanoine de la cathédrale de Tournai en 1865; entra chez les Capucins à l'âge de 56 ans (7 juillet 1871); professeur de théologie morale et de droit canon; décédé à Bruges le 21 avril 1904. Pourtant Vermeersch, éminent juriste, l'appellait 'Virum illum in juns scientia perfectum' et Mgr. Van Roey attribuait en grande partie aux travaux et aux écrits du Père Piat, l'efflorescence de la science juridique dans notre pays. ACB. VI. 57. ACB. VI. 750. ACB. VI. 786. ACB. VI. 288. Un définiteur est choisi tous les trois ans au cours du chapitre provincial. Sa tâche consiste à assister et à conseiller le Provincial dans l'administration de la province. ACB. VI. 591. ACB. III. 11142. Clotilde Ortegat, née à Enghien le 2 décembre 1830, fille de Michel-François et de Joséphine Parmentier; entrée chez les Clarisses-Colettines de Tournai le 28 mars 1853 sous le nom de Marie-Josèphe-Céline de Saint-François; fondatrice et premier abbesse du monastère d'Enghien le 24 mai 1881; décédé à Enghien le 27 août 1890 (Notice sur la vie de la Révérende Mère Marie-Josèphe-Céline de Saint-François, dans le monde Clotilde Ortegat, Abbesse et Fondatrice des Clarisses-Colettines d'Enghien 1830-1890, (Bruges), 1893). Exemplaire aux ACB. 305174. ACB. VI. 123. L'original de la lettre du ministre Vandenpeereboom à Eleuthère fut offert en mai 1907 par sa soeur Fientje (Joséphine) Vannuvel au couvent d'Enghien (ACB.III.9675, 1.15) et est actuellement conservée aux ACB .VI. 123. ACB. VI. 123: Panégyrique du P.Eleuthère d'Enghien prononcé au Tiers-Ordre de Mons par le Père Charles Thiriar de Farnilleureun. ACB. VI. 123 : Idem. Tous les documents relatifs à cette mission sont conservés aux ACB. VI. 123. ACB. III. 9675, p. 14: ce fait a été raconté le 24 juin 1906 par sa soeur Fientje (Joséphine) Vannuvel au Père Basile Tanghe de Bruges (1879-1947). ACB. II. 3191. Nous tenons à remercier M. Paul Bruyns qui a bien voulu assurer la traduction en français de cette étude rédigée en néerlandais, et M. Yves Delannoy qui a revu le texte.A la fin de mars 1615, quelques Capucins s'établirent à Enghien à la demande du prince-comte Charles d'Arenberg (1550-1616) et de son épouse Anne de Croy (1564-1635). L'un et l'autre voulaient batir ici un couvent dûment meublé ainsi qu'une chapelle qui leur seraient destinés. La premiere pierre du couvent fut posée le 31 mai 1615. Les Capucins purent occuper leur couvent au début de 1617, Ce fut le debut prometteur d'une aventure ouverte sur l'éternité (1). Avec des hauts et des bas, les Capucins ont vécu leur fraternité évangélique et se sont mis totalement au service de la popuIation d'Enghien et des environs dans le sillage de saint François. Mais cette vie franciscaine sera impitoyablement interrompue par I'appIication de la loi française du 15 fructidor an IV (1 er septembre 1796) lorsque, le 2 février 1797, tous les Capucins du couvent d'Enghien furent littérallement jettés à la rue. La fin d'une expérience religieuse et franciscaine était proche ! Lorsque le dernier restant des capucins du couvent d'Enghien, le frère Pascal Fontyne de Vollezele, mourut le 2 septembre 1830, ce décès signifiait-il la fin définitive et la disparition des Capucins d'Enghien. Une fin définitive?
Grâce à leur foi profonde, à leur attachement respectueux pour leurs ancêtres, inhumes dans la crypte, la duchesse Ludmille de Lobkowitz (1798-1868) et son époux le duc Prosper-Louis d'Arenberg (1785-1861), demandèrent aux Capucins de revenir à Enghien. Le 25 octobre 1850, ils revinrent de Bruges s'installer à Enghien. La vie franciscaine put reprendre son cours après une interruption de 53 ans. Un nouvel avenir ...
Oui ... Mais le 12 février 1995, un coup de tonnerre ! Ce jour-là, le Provincial des Capucins flamands écrivit une lettre à tous ses confrères pour les informer qu'en accord avec son définitoire, il avait décidé que les Capucins quitteraient Enghien parce que, dans toute la province, le nombre de confrères était en constante diminution, de sorte qu'il était impossible d'occuper rationnellement toutes les couvents et maisons. Le 26 avril 1996, les supérieurs généraux de l'ordre prononçaient la suppression du couvent des Frères Mineurs Capucins, situé à Enghien, rue des Capucins, n° 5, dont saint Joseph était le patron. C'était la fin définitive de la présence des Capucins à Enghien. Le dernier Capucin, Jean-Pierre Tytgat, a quitté le couvent le ler juillet 1997. Fin définitive?
Il est difficile de retrouver ou d'évaluer ce qu'a signifié la présence des Capucins pour la population d'Enghien et des environs sur le pIan moral, religieux, spirituel, social et culturel. Le mode de vie et l'inspiration individuelle ne sont généralement pas consignés dans la mémoire collective. Il est certain que les Capucins n'étaient pas venus ici pour y accomplir des actes héroïques mais y transposer dans leur vie personnelle et I'ordinaire quotidienneté l'esprit de saint François et le faire partager avec la population se mettant à I'entière disposition de celle ci.
Ill. 1: La communauté des Capucins d'Enghien en 1909.
1e ligne : Médard Melis de Turnhout, Félicien Botte de Louvain, Adolphe Kestens de Denderwindeke, Alphonce Melis de Turnhout, Everard Smets de Neerpelt, Fulgence Carnonckel de Grammont.
2e ligne : Paul Opsomer de Paris, Chérubin De Keyser de Renaix, Florimond Luyten de Zoerle-Parwijs, Rainald Lepens de Mouscron.
Une communauté vivante ne peut vivre repliée sur elle même et faire du nombrilisme. La fraternité évangélique est le premier moyen d'apostolat et de rayonnement. Elle doit être un témoignage permanent. Il lui faut semer ... Dieu seul connaît la moisson. Il est incontestable que la présence des Capucins a eu une influence sur les vocations religieuses en ville et dans la région. Leur exemple et leur mode de vie ont attiré des jeunes et les ont incités à s'aventurer de même dans cette vie animée de l'esprit de saint François, et à s'y réaliser. Ils ont également voulu devenir Capucins.
Avant la suppression des ordres religieux en 1796, 49 Enghiennois sont entrés chez les Capucins de la province flamande ou wallonne. Leurs noms sont connus bien que, pour beaucoup d'entre ceux qui ont fait choix de la province wallonne, seul, leur nom de religion nous soit parvenu (2). A titre de rappel, je communique ici brièvement le nom, les années de naissance et décès, des Capucins natifs d'Enghien antérieurement à 1796 dont le nom de famille est connu (3). Les mentions entre parenthèses renvoient à l'important ouvrage du Père Hildebrand, archiviste de la province belge des Capucins de 1913 à 1958: on y trouve diverses précisions biographiques les concernant.
Anthony, Adrien, 1566-163 1 (IV, 512)
Bradefer, Jean, 1576-1635 (VII, 2452)
Cornet, Egide, vers 1608-1666 (VII, 1196)
Cortenbosch, Léopold, 1734-1807, (IV, 3458)
Damery, Martin, 1566- ? (IV, 2550)
Descamps, Pierre-Joseph, 1737 -après 1802 (IV, 495)
Douzaine, Jean-Baptiste, 1723-1805 (IV, 880)
Flasschoen, Jacob, 1740-1799 (VII, 2403.2431)
Huysman, Charles, 1606-1657 (IV, 336)
Huysman, ?, vers 1660-après 1729 (IV, 1349)
Mabeel, Charles, 1728-après 1796 (IV, 1672)
Malloit, Nicolas, 1758-1810 (IV, 1564)
Paternoster, Elias, vers 1606-1652 (VII, 1958)
Paternoster, ?, vers 1706-1770 (IV, 3084)
Pletincx, Pierre, 1657-1712 (VII, 1787)
Scokart, Nicolas², 1671-? (IV, 771 ?)
Tomboy, Pierre, 1752-1812 (VII, 63)
Vandersteen, François, 1652-1718 (VII, 2571)
Van Lanckvelt, Martin, vers 1616-1679 (VII, 1014)
Après le retour des Capucins à Enghien en 1850 neuf Enghiennois entrèrent encore chez les Capucins de la province Hollando-Belgica (1845-1882) et la province belge (1882-1958). Qui étaient ils? Qu'ont-ils fait? Nous ne devons pas en faire des saints mais nous pouvons supposer qu'à leur manière, ils ont aspiré à la sainteté. Nos prédécesseurs en religion n'étaient que des hommes de chair et de sang qui, lors de leur profession, ont chanté "Ecce quam bonum et quam jucundum habitare fiatres in unum". C'étaient des Capucins ayant leurs idéaux et aspirations personnels, portant de grands et petits soucis animés d'espérance, affligés aujourd'hui, réjouis demain, aspirant à la sainteté malgré le péché ... Eux aussi, vivaient et travaillaient dans un monde qu'ils devaient subir et assimiler jour par jour, en bien comme en mal. Certains ont hissé très haut l'étendard séraphique; d'autres moins ou pas du tout. Maintenant qu'il n'y a plus de présence tangible et visible des capucins à Enghien, si ce n'est dans le témoignage silencieux des pierres et des objets, il est bon de rappeler ces Capucins enghiennois, qui ont suivi la voie de saint François, afin que leur vie puisse devenir un témoignage permanent (4).
BERTAU Gustave (5) est né à Enghien le 22 avril 1836, fils de Constantin et d'Henrica CLEMENT. Il est entré chez les capucins le 17 septembre 1855 et a reçu le nom de religion de Modeste. Il a prononcé ses voeux le 18 septembre 1856. Il fut ordonné prêtre le 2 juin 1860.
Ill. 2: Bertau Gustave (Modeste d'Enghien). Image mortuaire.
Dès avril 1861, il fut nommé vicaire au couvent de Bruxelles, rue des Tanneurs (6).Il y passa toute sa vie et y occupait dans l'église des Capucins, place du Jeu de balle, un confessionnal très fréquenté. Comme confesseur, il était l'ange gardien terreste de toutes les âmes qui habitaient le quartier des Minimes à Bruxelles. Modeste souffrait d'une naturelle timidité de caractère et d'un léger embarras de parole de sorte qu'il éprouvait une crainte invincible de la chair qui le tenait éloigné de la prédication. Pour permettre à ses confrères de consacrer plus de temps à la préparation de leurs prédications et aussi, quelque peu, pour se rendre utile malgré tout (comme finement il le disait) il se fit visiteur de malades dans la paroisse des Minimes et dans le quartier des Marolles. Il assura ce service jour et nuit jusqu'à sa mort.
Ill. 3: Bertau Gustave (Modeste d'Enghien). Portrait.
Pendant l'impitoyable épidémie de choléra qui sévit à Bruxelles de mai à novembre 1866, Modeste se dévoua sans limite aux malades et agonisants des impasses, ruelles et rues du quartier des Marolles. Les archives du couvent de Bruxelles mentionnent spécialement: "Tous les Rév. Pères se dévouèrent jour et nuit à l'administration des malades; parmi eux le Rév. Père Modeste d'Enghien se distingua encore par son zèle et le grand nombre de malades qu'il assista".
En 1906, à partir des déclarations faites par le Père Michel Breda de Hellebecq (7), le Père Basile Tanghe de Bruges nous a laissé ce récit: un beau jour, le gardien demanda à Modeste de pouvoir l'accompagner dans ses visites et faire ainsi connaissance avec les ravages effrayants causés par le choléra dans la population afin, s'il était sollicité d'administrer les derniers sacrements, de ne pas se trouver alors devant une maladie inconnue et dans une situation trop perturbante. Modeste, accompagné de son gardien, entra dans une maison. Il y régnait une puanteur indescriptible. Plusieurs enfants décédés gisaient à même le sol, entièrement nus et le ventre fortement enflé. Dans la même pièce, il y avait encore deux personnes vivantes, mais agonisantes. Le Père gardien ne put le supporter plus longtemps et se précipita à la fenêtre pour aspirer de l'air frais, pendant que Modeste soignait et consolait les deux malades (8).
Lors de ses visites nocturnes il contracta une bronchite chronique qui provoquait une toux pénible, rebelle à tout remède. Elle l'a conduit au tombeau. Aux confrères qui le pressaient de se soigner, il répondait gaiment que cette toux était son mal de tous les ans, qu'il n'y avait rien à faire, et que cela devait s'user, sans recours aux dispenses et aux exceptions. Il n'en fut pas ainsi; le mal persista, et finit par l'emporter. Modeste mourut au couvent de Bruxelles le 22 décembre 1897 et fut inhumé à Enghien.
BORREMANS Jean-Baptiste naquit à Enghien le 17 mai 1830, fils de Philippe et de Jeanne DIMARET. Il fut le premier Enghiennois à entrer chez les Capucins, le 23 avril 1852, après la suppression de l'Ordre pendant l'occupation française (1796). Lors de sa prise d'habit, il reçut le nom de religion de Léonard. Il prononça ses voeux le 25 avril 1853. Il mourut au couvent d'Enghien quelques mois plus tard, le 6 septembre 1853, et y fut inhumé.
Illustrations:
Ill. 4: Borremans Jean-Baptiste (Léonard d'Enghien). Image mortuaire.
DECRICK Nestor (9) est né à Enghien le 16 novembre 1855, fils d'Hubert-Joseph et de Pétronilla DE RIDDER. Comme son père était déjà décédé en 1857, il fut placé en juin 1869 à l'orphelinat d'Enghien, grâce au droit de nomination du duc d'Arenberg. Contrairement à la plupart des orphelins qui étaient placés comme apprentis chez un cordonnier ou un tailleur en ville, il fit ses humanités au collège d'Enghien (10). Il entra chez les Capucins le 18 septembre 1875 et reçut le nom de religion de Prosper. Il prononça ses voeux le 19 septembre 1876 et fut ordonné prêtre à Bruges le 11 juin 1881.
Illustrations:
Ill. 5: Decrick Nestor (Prosper d'Enghien). Image mortuaire.
Au cours des premières années de sa vie sacerdotale, il fut le collaborateur et l'assistant du Père Piat Loiseaux de Mons (11) au couvent de Bruges Sainte-Claire. Lorsque le Père Piat eut demandé et obtenu sa démission de professeur de théologie morale et de droit canon en 1888, Prosper fut d'abord désigné comme son successeur mais finalement il ne fut pas nommé. Au cours de la même année 1888 il devint prédicateur et confesseur à Meersel-Dreef, puis prédicateur et confesseur à Bruges Sainte-Claire (mars 1892), ensuite à Meersel-Dreef (août 1893), Mons (1894), Verviers (1896), Mons (1900-1908), Ciney (1908-1910) et Mons depuis 1910 jusqu'à son décès. Il occupa, en outre, les fonctions de bibliothécaire des couvents de Ciney et Mons. Il aimait surtout de faire les honneurs de la bibliothèque du couvent. Il est vrai de dire qu'il la tenait admirablement bien. Pas un livre qui ne fut minutieusement catalogué, pas une fiche qui ne fut exactement dressée. C'était un plaisir de visiter le sanctuaire du P. Prosper.
Illustrations:
Ill. 6: Decrick Nestor (Prosper d'Enghien). Portrait.
Entre 1894 et 1907 Prosper publia plusieurs ouvrages de dévotion et brochures en l'honneur de saint Joseph (Le scapulaire de Saint Joseph, Appel aux dévots serviteurs de saint Joseph), de saint Antoine (entre autres Manuel complet de la dévotion à Saint-Antoine de Padoue, Le Mardi de Saint-Antoine, Saint-Antoine de Padoue et son culte), la Sainte Eucharistie et le Sacré-Coeur de Jésus (Un mot sur la Sainte Eucharistie et le Sacré-Coeur de Jésus) et Notre-Dame de Belle Dilection, vénérée chez les Capucins de Mons (Petit manuel de dévotion). La plupart de ces petits ouvrages sans prétention connurent plusieurs éditions. C'est ainsi que "Treizaine, prières et cantiques en l'honneur de Saint-Antoine de Padoue" connut quatre éditions. La plupart des brochures furent traduites en néerlandais.
En 1912-1913, il publia dans Etudes franciscaines, tomes XXVII, XXVIII et XIX un aperçu chronologique très détaillé des ouvrages et travaux du Père Piat de Mons: Une réparation Le chanoine Jean-Joseph Loiseaux du diocèse de Tournai le Très Révérend Père Piat de Mons Frère-Mineur Capucin. Par cette publication il voulut essayer de combler une regrettable lacune dans Dictionnaire de Théologie Catholique où dans le chapitre septième Sciences sacrées de l'exposé des doctrines de la théologie catholique en Belgique, l'auteur Mgr. Lamy ne dit pas un mot de Loiseaux (12) et ne cite même pas un de ses nombreux ouvrages. Dans son aperçu, Prosper analyse surtout la naissance et l'histoire du périodique Mélanges théologiques et de ses prolongements Revue théologique et Nouvelle revue théologique. En avril 1926, il reprendra et approfondira cette étude et la publia dans une volume: Travaux et publications de Monsieur l'abbé Jean-Joseph Loiseaux, T.R.P Piat de Mons.
Prosper mourut inopinément le 18 novembre 1926 à Mons, à son retour d'une prédication. C'est à juste titre que son image mortuaire mentionna: "Cher Confrère, à cette heure, nous l'espérons, vous vous réjouissez, et pour jamais, d'avoir porté de si longues années et à notre grande édification, le joug de cette Règle franciscaine que St-François lui-même appelait: le livre de vie, l'espérance du salut, le gage de la gloire ..." Son nécrologe dans l'Etendard franciscain mentionne: nous conservons du Cher Défunt le souvenir d'un homme qui fut bon, qui se montra très doux malgré une grande vivacité de tempérament, le souvenir d'un confrère généreux et dévoué. Prosper fut inhumé à Mons.
DODELET Joseph (13) naquit à Enghien le 5 novembre 1899, fils d'Emile et de Marie VERMANG. Il entra chez les Capucins le 3 octobre 1918 et y reçut le nom de religion d'Eusèbe. Il prononça ses voeux le 21 octobre 1919 et fut ordonné prêtre à Izegem le 4 octobre 1925.
Il fut nommé prédicateur à Enghien en juillet 1927 et quelques années plus tard à Tournai. En mars 1934 il dut partir à Louvain pour quelques mois et y suivre un traitement contre le diabète. Au cours de sa convalescence, il y assuma la tâche de sacristain. En 1934 encore, il fut nommé prédicateur à Verviers. Il put y déployer pleinement son talent de prédicateur. En raison de sa petite taille, on le surnommait Petit Père.
Très versé en botanique, le voici membre de l'Académie Royale de Botanique de Belgique et membre des Naturalistes verviétois, où il jouissait d'une grande autorité. En cette dernière qualité, il donnera plusieurs conférences sur les fleurs et les plantes et publiera divers articles dans la Revue vewiétoise d'histoire naturelle.
C'est à juste titre qu'il lui fut rendu hommage à l'occasion de la célébration de ses 20 années de serviabilité à la paroisse Saint-Joseph à Verviers. Un rapport de l'époque mentionne: "M. le curé prit la parole pour dire l'immense gratitude du clergé et de la paroisse envers ce bon petit moine qui accrocha à sa bure de longues files de gens, des plus jeunes aux plus vieux, grâce à sa gaîté, à sa gentillesse et à sa serviabilité. Il le silhouetta finement, avec son allure sautillante, courant toujours, sans toujours réussir à arriver à temps, de sa capucinière de la rue du Prince à l'église des Carmes où il apportait son ardeur souriante. Il reçut, pendant les vingt ans qu'il y passa, desmilliers de confidences et il était vraiment le prêtre tel que le Bon Dieu l'a voulu, dans ses messes, son confessionnal, ses semons où il apportait un humour qui déridait l'assistance à qui il savait dire, particulièrement aux fiancés, de dures vérités. Il fut le guide et l'ami des petits, des scouts, des jeunes gens, des futures vocations. Il fut le consolateur des malades auxquels il donnait, non seulement le réconfort de sa présence et de sa parole mais des conseils puisés dans sa science de botaniste... Il s'en va, les mains pleines de mérites... Il peut chanter en partant le Magnifcat: il lui a été donné beaucoup de choses et il a réalisé beaucoup de bien".
Y a-t-il pour un religieux, pour un Capucin, une plus grande joie que de pouvoir entendre cela?
Illustrations:
Ill. 7: Dodelet Joseph (Eusèbe d'Enghien). Portrait.
Le Petit Père Eusèbe mourut au couvent de Verviers le 29 octobre 1963 et y fut inhumé.
Illustrations:
Ill. 8: Vermang Marie. Image mortuaire.
DUBOIS Joseph-Nicolas (14) est né à Enghien le 28 septembre 1824, fils de Guillaume et d'Augustine BUYENS. Il entra chez les Capucins le 14 octobre 1852 et reçut le nom de religion de Désiré. Il prononça ses voeux le 14 octobre 1853 et fut ordonné prêtre le 6 juin 1857.
Après son ordination, il appartint d'abord à la communauté de Bruxelles dont il devint le vicaire en 1864, puis en novembre 1867 au couvent d'Anvers comme prédicateur et confesseur. En 1871, il fut prédicateur lors des pélerinages à Notre-Dame de Hal. Au début de 1868, il fonda au couvent d'Anvers le Tiers-Ordre pour hommes et en resta directeur spirituel jusqu'à son décès.
Désiré mourut au couvent d'Anvers le 15 septembre 1879 et fut inhumé à Hoogboom (Ekeren).
Illustrations:
Ill. 9: Dubois Joseph-Nicolas (Désiré d'Enghien). Image mortuaire.
Illustrations:
Ill. 10: Dubois Joseph-Nicolas (Désiré d'Enghien). Portrait.
DUTILLEUX Louis (15) naquit à Enghien le 21 octobre 1911, fils d' Amand et de Jeanne DESENFANS. Il entra chez les Capucins le 15 septembre 1930 et y reçut le nom de religion d'Edouard. Il prononça ses voeux le 17 septembre 193 1 et fut ordonné prêtre le 8 mai 1938.
En août 1939, il fut nommé missionnaire à la mission de Lahore (Inde britannique, devenue le Pakistan) mais la mobilisation de l'armée belge (1939) l'empêcha de s'y rendre. Brancardier, il participa comme aumônier au début des hostilités. Fait prisonnier, il séjourna dans un camp quelque part en Allemagne jusqu'à fin mars 1941.
Illustrations:
Ill. 11: Dutilleux Louis (Edouard d'Enghien). Image mortuaire.
En septembre 1945, Edouard partit comme missionnaire en Ubangi (Congo belge, devenu Congo) et, pendant quelques années, dirigea l'école de Banzyville avant d'être envoyé comme missionnaire en brousse pour la région de Banzyville et de Kotakoli. Il s'y déplaça constamment à pied, vélo et plus tard à moto d'un village à l'autre pour y dispenser son aide matérielle et spirituelle, ses encouragements, baptiser, bénir des mariages et assister des agonisants. Pour raisons de santé, il rentra définitivement en Belgique en 1964. Il se mit à la disposition de son Ordre comme prédicateur et demanda de pouvoir résider au couvent de Mons, ce qui lui fut accordé. Chaque année, il assistait à la fête missionnaire des Capucins à Enghien tant pour remercier les Enghiennois d'un mot et d'un sourire, que pour les encourager dans leur engagement en faveur des missions des Capucins au Pakistan et au Congo.
Illustrations:
Ill. 12: Dutilleux Louis (Edouard d'Enghien). Portrait.
Lorsqu'en juillet 1958, la province belge des Capucins fut scindée en une province flamande et une wallonne, il lui fut difficile d'accepter cette scission: il ne comprenait pas pourquoi les Capucins belges devaient ou voulaient se séparer. Il le répéta abondamment car il avait le coeur sur la main.
Edouard mourut au couvent de Mons le 1er juillet 1977.
LAMBRECHTS Jules-Hubert (16) naquit à Enghien le 17 avril 1846, fils de Corneille et de Pauline BERTAU. Il entra chez les Capucins le 3 octobre 1867 et y reçut le nom de religion d'Apollinaire. Il prononça ses voeux le 8 octobre 1868 et fut ordonné prêtre à Bruges le 21 décembre 1872.
Illustrations:
Ill. 13: Lambrechts Jules (Apollinaire d'Enghien). Image mortuaire.
En 1874, il fut prédicateur, membre de la communauté de Bruges Saint-Claire et, l'année suivante, professeur de philosophie. De 1876 à 1891, il exerça cette fonction au couvent d'Anvers.
Illustrations:
Ill. 14: Lambrechts Jules (Apollinaire d'Enghien). Portrait.
Le 6 septembre 1889, lors de l'explosion du magasin à poudre de Corvilain à Austruweel, qui provoqua des dégâts épouvantables et de nombreux décès, il fut l'un des premiers à offrir aux victimes son aide tant physique que spirituelle. De 1891 à 1896, il exerça son lectorat à Bruxelles, avant de le poursuivre ensuite à Verviers jusqu'en 1901. Apollinaire était considéré comme l'un des professeurs les plus compétents de son temps. Il fut aussi pendant un certain temps professeur d'histoire de l'Eglise (1876-1884). Il devint ensuite préfet des études des étudiants en philosophie à Bruges Sainte-Claire (1901). En 1909, il demanda et obtint d'être déchargé de sa fonction et alla résider à la maison d'étude de Louvain.
De 1882 à 1919, il remplit la charge de maître d'oeuvre. A ce titre, il devait veiller à la conformité des plans de construction, transformation, extention de couvents avec les constitutions des Capucins et contrôler régulièrement l'exécution des travaux.
Il fut gardien à Anvers (1885-1888), Verviers (1897-1900) et Bruges Sainte-Claire (septembre 1901-1909) et définiteur (17) dans les chapitres provinciaux de 1903 et 1906.
Apollinaire mourut au couvent de Louvain le 12 mai 1921 et fut inhumé à Enghien. La nécrologie de la province belge relève à son sujet: "il a vécu d'une manière très sévère pour lui-même, jusqu'à sa mort, il observa très scrupuleusement tous les jeûnes de notre Sainte Règle et refusa toujours le moindre allègement en sa faveur". En effet, Apollinaire était très fidèle à la tradition franciscaine et aux usages en vigueur chez les Capucins.
VANDERSLYEN François (18) naquit à Enghien le 15 mars 1842, fils de Jean-Baptiste et de Thérèse CLEREBAUT. Il entra chez les Capucins le 26 septembre 1861 et y reçut le nom de religion d'Eusèbe. Il prononça ses voeux le 28 septembre 1861 et fut ordonné prêtre le 26 mai 1866. Au chapitre provincial de 1867, il fut nommé socius du maître des novices au couvent d'Enghien et aussi prédicateur à la chapelle du couvent et confesseur. En 1871, il fut prédicateur, confesseur et bibliothécaire au couvent de Mons. En 1873 il fut gardien à Bruges Sainte-Claire (1873-1876), à Bruxelles (1876-1879), Bruges Sainte-Claire (1885-1888 et 1891-1894), Anvers (1894-1897) et Mons (1900-1903).
Il fut élu définiteur lors de quatre chapitres provinciaux successifs (1888, 1891, 1894 et 1897) et maître des novices à Enghien de septembre 1880 à septembre 1885 et de mai 1897 à septembre 1899. Il aimait la jeunesse et en était aimé. Rien ne lui était agréable comme d'entendre dire qu'il était pour ses novices moins un Maître qu'une Mère. En qualité de responsable de l'instruction des jeunes religieux, il donna le cours d' Expositio regulae FF.Minorum, dont un manuscrit, écrit par un novice en 1882, se trouve aux archives des Capucins à Anvers (19).
En 1896, il rédigea une brochure détaillée Appel au Tiers-Ordre destinée à propager la spiritualité, les objectifs et obligations du Tiers-Ordre de Saint-François.
Illustrations:
Ill. 15: Vanderslijen François. Image mortuaire.
La même année, l'évêque de Tournai lui demanda de rassembler tous les témoignages sur la vie et les vertus de la mère abbesse Céline Ortegat, fondatrice et première abbesse au monastère des Clarisses d'Enghien, et d'introduire le procès en béatification (20). Le résultat apparut dans les Positiones et Articulos exhibet ... in causa beatificationis Servae Dei Josephae Coelinae Ortegat, Abbatissae Conventus Ordinis Monialium Clarissarum. Colettarum Anghiae degentium. Il réunit non seulement toutes les données concernant sa vie vertueuse, ses oeuvres et ses prières, mais aussi les miracles qui s'étaient accomplis à son intervention. Ces Positiones et Articulos furent imprimés par A. Spinet à Enghien (21).
Illustrations:
Ill. 16: Vanderslijen François (Eusèbe d'Enghien). Portrait.
Maître des novices des frères non prêtres à Anvers depuis 1904.
Eusèbe mourut au couvent d'Anvers le 15 février 1905 et fut inhumé à Hoogboom (Ekeren). Son décès est mentionné comme suit dans les archives du couvent: "Homme simple et doux, dévoué jusqu'à l'excès, il avait conquis l'estime et l'affection de tous ceux qui le connurent. Il fut un religieux exemplaire, un supérieur prudent et bienveillant. Sur son lit de mort, il put émettre ce beau témoignage: "Je ne me souviens pas d'avoir jamais fait souffrir quelqu'un volontairement".
VANNUVEL Hubert (22) naquit à Enghien le 16 mars 1836, fils de François-Joseph et de Jeanne-Catherine PEREMANS. Après ses études moyennes au collège épiscopal d'Enghien, il entra au grand séminaire de Tournai. Au cours de ses études de théologie, il quitta le grand séminaire pour entrer chez les Capucins le 4 octobre 1859, jour de la fête de saint François. Il reçut comme nom de religion Eleuthère. Il prononça ses voeux le 9 octobre 1860 et fut ordonné prêtre le 10 juin 1862.
Illustrations:
Ill. 17: Vannijvel Hubert (Eleuthère d'Enghien). Image mortuaire.
En 1864, il fut professeur de dogmatique et Ecriture Sainte au couvent récemment fondé à Mons. Pendant l'épidémie de choléra de 1866 il se dépensa en faveur des victimes de la maladie à Estinnes-au-Mons. En octobre 1867, il reçut du ministre de l'Intérieur Vandenpeereboom une lettre de remerciements "ayant noblement et courageusement rempli, dans ces tristes circonstances, les devoirs souvent périlleux de votre mission de charité" (23) .
Il fut élu définiteur au chapitre provincial de 1867 et gardien du couvent de Bruxelles puis, en juin 1869, directeur spirituel du Tiers-Ordre pour hommes et pour femmes ainsi que prédicateur et confesseur. Elu Provincial lors du chapitre suivant de 1870, il choisit comme résidence le couvent de Bruxelles. Comme Provincial également, il rendit visite aux pauvres et aux malades des Marolles pour les aider et les soutenir "d'où il revenait parfois couvert de vermine" (24).
Lorsque sa fonction de Provincial arriva à son terme, il devint vicaire du couvent de Bruxelles. Il continua à se dépenser en faveur des pauvres: "Elle peut en dire beaucoup, cette femme infortunée du quartier des Minimes, logée dans une pauvre mansarde, sur un grabat de douleur, couverte d'une lèpre affreuse et dégoûtante, tourmentée par le mal qui la ronge continuellement. Lorsque notre bon Père se trouvait à Bruxelles, cette malheureuse femme était abandonnée de tout le monde, à l'exception d'une dame charitable qui payait son loyer et de notre Père qui mendiait pour elle, et aimait à aller la visiter pour la consoler et la fortifier. (25)
En 1873, il fit partie de la Commission de révision du Cérémonial ou Livre des usages de la province belge des Capucins. La mission de cette commission était délicate: elle devait réviser le Cérémonial en vigueur, datant de 1759, et l'adapter, sans porter atteinte au caractère propre de la tradition et des usages de la vie quotidienne des Capucins. Plusieurs points d'un Cérémonial désuet ne pouvaient être soit maintenus soit adaptés en raison de l'évolution du temps tandis que d'autres n'étaient plus conformes aux nouvelles prescriptions liturgiques.
Illustrations:
Ill. 18: Vannijvel Hubert (Eleuthère d'Enghien). Portrait.
Lui "en qui toutes les conditions de science, de discrétion, de fermeté et de zèle (étaient) réunis", fut envoyé par le ministre général comme commissaire général aux provinces des Capucins de Lyon et de Toulouse (1875) (26). Eleuthère devait y remplir une mission 'laborieuse et délicate'. Cette mission l'obligeait à visiter tous les couvents des deux provinces, y entendre et y interroger tous les religieux. De ces entretiens et ces constatations, il devait remettre au ministre général un rapport détaillé proposant des solutions pour faire vivre à nouveau les Capucins de Lyon et de Toulouse comme de vrais Capucins, en unité avec l'Ordre tout entier. La discorde divisait, en effet, les religieux de ces deux provinces: insatisfactions personnelles, refus de certains concernant la fondation éventuelle d'un couvent, diffusion des décisions des chapitres et des règlements provinciaux, etc ... (1873). Le Père général écrivit à Eleuthère que "l'autorité (est) trop méconnue en France" et qu'il lui donnait donc tous les pouvoirs d'un provincial pour prendre les mesures qui s'imposaient et qui seraient de nature à rétablir l'unité entre les Capucins. Si cela ne suffisait pas, Eleuthère devait en informer le général et ses pouvoirs seraient encore plus étendus. Pendant trois mois, de juin à août 1875, Eleuthère visita les deux provinces. En conclusion de ses visites, il présenta au ministre général un rapport avec diverses propositions qu'il importerait de respecter ponctuellementt pour rétablir l'autorité et l'unité dans ces provinces. En octobre 1875, il reçut du ministre général une lettre soulignant qu'il avait "rempli avec notre pleine satisfaction la charge si délicate que nous vous avons confiée. Le Seigneur voudra bien vous récompenser de toutes les peines et travailles que vous avez endurer dans la visite".
Il sera élu à nouveau premier définiteur lors du chapitre provincial de 1876. Il résida ensuite au couvent de Mons où il devint confesseur et directeur spirituel du Tiers-Ordre. L'évêque de Tournai lui demanda de réformer les Franciscaines de Soignies. Chaque semaine, un jour ou deux, il se rendait à Soignies pour rédiger avec les Soeurs de nouvelles règle et constitutions.
Au cours d'un de ses séjours chez les Soeurs - ce sera le dernier - on vint lui demander de venir à l'hôpital pour y entendre la confession d'un mourant et lui administrer les derniers sacrements. Le malade qui souffrait de la vérole, mourut dans les bras d'Eleuthère. Le même jour, il retourna à Mons, mais, le lendemain, il arriva au réfectoire totalement incohérent et à moitié vêtu, en disant "ou bien je deviens fou, ou bien je vais devenir un grand malade". En effet, Eleuthère était lui-même atteint de la vérole (27). Seuls, les deux frères-infirmiers et le gardien purent venir dans sa chambre, en observant de strictes mesures de précaution. Personne d'autre n'était admis, car le malade était fort contagieux. Son oncle, le chanoine Devroede, put toutefois lui rendre visite. Après 14 jours de souffrances inhumaines, Eleuthère mourut au couvent de Mons le 22 février 1877. "Par piété et par conformité avec St-François, il obtint de supporter son terrible mal étendu sur le sol que recouvrait à peine un peu de paille". Il fut inhumé à Mons.
Son décès est mentionné en ces termes aux archives du Provincial: "doué des plus belles qualités de l'intelligence et du coeur; d'une piété aussi forte que tendre, d'un amour pour son ordre aussi droit qu'élevé ... En toute circonstance, au milieu des étrangers comme parmi les siens, dans les moindres détails aussi bien que dans les plus sérieuses difficultés, le TR.R Eleuthère fut également simple et réfléchi, pieux et enjoué, ferme et bon, ne reculant devant aucun obstacle, n'abaissant le devoir et la loi devant personne" (28).
Ces neuf Enghiennois ont choisi une vie de disciple de saint François. Chacun à leur manière, ils ont tenté ce qui figure au début de la Règle des Frères mineurs: "La Règle de vie des Frères Mineurs consiste à observer le saint Evangile de notre Seigneur Jésus-Christ, en vivant dans l'obéissance, sans avoir rien en propre et dans la chasteté". Ils ont tenté de réaliser pour tous les hommes un morceau de paradis sur terre, ainsi que l'a fait aussi saint François qui voyait l'homme, son frère et sa soeur, à la lumière de Celui qui était l'homme parfait et le Fils du Dieu tout puissant. Eux et nous, croyons ce qui se trouve dans le testament de saint François: "Quiconque observera ces choses, qu'il soit béni dans le ciel de la bénédiction du Père très haut, qu'il soit rempli sur la terre de la bénédiction de son Fils bien-aimé, avec celle du très saint Esprit Paraclet, de toutes les Vertus des cieux et de tous les saints. Et moi, frère François, votre petit pauvre et serviteur; de tout mon pouvoir: je vous confirme, au dedans et au dehors, cette très sainte bénédiction".
Jean-Pierre TYTGAT (29)